Un rencard avec Pichard

Mis à jour le 13/09/2022
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Paragraphes

Tristan Pichard nous livre ses secrets sur le métier d'auteur jeunesse et sur l'écriture de polars pour ados

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1 - Tristan, Kidiklik t'a connu pour tes ouvrages dédiés aux plus petits, comment as-tu évolué vers les romans pour ados ?

J'ai toujours écrit pour les ados. C'est important pour moi de changer régulièrement de tranches d'âge, car on ne parle pas des mêmes choses et de la même manière à des enfants de 3/5 ans et à des ados de 13/15. Par contre, écrire pour les grands demande plus de temps, alors je sors un roman pour les collégiens quand je fais quatre ou cinq albums pour les plus petits.

2 - Comment écrit-on un roman pour ados ?

Sensiblement comme un roman pour les adultes, je pense. C'est juste l'angle d'attaque qui n'est pas le même, et la complexité psychologique qui change. On ne peut pas se permettre le même niveau d’ambiguïté quand on s'adresse aux ados plutôt qu'aux adultes. J'élabore d'abord une intrigue et je fais des portraits des différents personnages pour bien les connaître. Ensuite, je me lance dans la rédaction.

3 - Est-ce que tu t'exprimes dans le langage « djeuns » ?

Non et oui. Non, parce que c'est très vite ridicule et que ça se démode presque tout de suite. Je ne parle pas comme ça dans la vraie vie et je redoute de faire artificiel. Par contre, je fais parler mes personnages d'une façon assez orale pour donner un côté "vrai". C'est un délicat mélange. J'utilise parfois des gros mots par exemple, parce que les adolescents en disent quand ils parlent entre eux et que ça sonnerait faux sinon. Des parents et des documentalistes me le reprochent parfois. Tant pis, je n'écris pas pour eux. Je suis persuadé qu'aucun lecteur n'a appris un gros mot en me lisant ! J'ai la conscience tranquille.

4 - Le style policier et SF s’est imposé naturellement à toi ?

Oui, je n'ai pas trop réfléchi à tout ça. J'aime les histoires avec des coups de théâtre, des révélations, des twists, du suspens... et ça se prête bien au polar ou à la SF. Je n'invente pas de monde par contre, mes romans sont toujours ancrés dans le réel. Les personnages vont au collège, ils ont des parents, ils tombent amoureux... Ce n'est pas de la Fantasy, même si parfois il s'y passe des choses surnaturelles.

5 - Quel était ton objectif du départ avec le premier Time Zone ?

Je voulais mélanger l'ordinaire et l'extraordinaire. Parler des ados et de leur problèmes quotidiens, mais dans un contexte hors-norme. Je voulais aussi faire un livre qui plaise à ceux qui ne lisent pas ou peu. J'ai volontairement construit l'histoire avec de courts chapitres, de courts paragraphes, des dialogues très oraux et un changement de point de vue entre les deux personnages principaux. Tous ces outils dans la composition du roman le rende très dynamique et facile à lire. Rien en me fait plus plaisir que d'entendre un gamin de troisième me dire que pour une fois il a lu avec plaisir, sans se forcer.

6 - Dans tes ouvrages, les lecteurs suivent plusieurs narrateurs... C'est ta spécificité ?

J'ai du mal à écrire autrement, en suivant un seul personnage. J'ai vite l'impression d'être à l'étroit. Je l'ai pourtant fait avec succès dans "Quelque Chose de Pourri au Royaume du Français" qui est écrit à la première personne et où on suit le narrateur du début à la fin. Mais c'était compliqué, j'avais très vite envie de raconter le point de vue d'un autre personnage, ou de narrer une intrigue secondaire comme je l'entendais. L'alternance de points de vue est très pratique, et comme j'aime dessiner des personnages contrastés cela permet de montrer au lecteur qu'il existe plusieurs manière de voir les choses. j'aime beaucoup raconter la même scène avec des ressentis différents. C'est important pour moi de montrer ça dans mes livres, de forcer à voir les choses sous un autre angle pour interroger sa manière de faire, de voir, de comprendre qu'on ne détient pas la vérité et que ce qui est simple pour nous peut-être difficile pour un autre et vice-versa.

Découvrez la série TIme Zone pour ados

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" Ce qui est incroyable comme émotion, c'est quand on sent qu'on tient une bonne idée, une vraie.... "

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7 - Comment construit-on des personnages de romans ?

Pour la construction des personnages, il existe des petits trucs qu'on apprend sur le tas. Je me demande souvent ce que mon personnage fait mieux que tout le monde, et ce qu'il est incapable de faire correctement. C'est une bonne manière de le rendre unique. Dans Time Zone Manon est très forte en sarcasme, par contre elle est mal à l'aise avec les gens et ne sait pas se montrer naturel avec eux. Alors que David cherche avant tout à être conciliant avec les gens, il a un a priori favorable à la nouveauté (ce qui est une véritable qualité), par contre il nie facilement ses émotions quand elles sont négatives. Dans la suite de Time Zone, j'ai développé d'autres aspects de leurs personnalités. Leurs relations avec leur parents sont plus complexes, ils s'interrogent beaucoup sur leurs sentiments. Manon est toujours sarcastique, mais elle assume mieux son indignation face à certaines injustices du monde, elle se montre moins individualiste. Elle a muri. De même pour David qui accepte enfin de reconnaître que d'avoir été adopté pose de vraies questions en lui qu'il ne peut ignorer plus longtemps. C'est un travail très intéressant que de les voir grandir comme ça.

8 - D’où vient cette imagination débordante qui fait ta plume ?

L'imagination, c'est un muscle. Plus on la travaille, plus elle se fortifie... Si vous voulez vous muscler, prenez une demi-heure chaque jour et faite le résumé d'un roman que vous pourriez écrire en 10 ou 20 lignes. Faites ça pendant 10 jours. Dix jours = dix romans potentiels. Dites vous : "aujourd'hui j'imagine un polar" ou "qu'est-ce que je ferais si je devais écrire sur la vieillesse ?" et chaque jour vous changez radicalement d'angle. Promis, après ça vous n'aurez plus jamais de panne d'inspiration...

9 - Qu’est-ce qui fait de toi un auteur heureux ?

Hum... Quand je commence un nouveau roman et quand je l'achève. Ce sont toujours des moments très stimulants. Après, qu'on me dise que c'est bon, qu'on a ri, qu'on a eu peur en me lisant, c'est agréable, mais ce n'est pas ça qui me rend le plus heureux. Ce qui est incroyable comme émotion, c'est quand on sent qu'on tient une bonne idée, une vraie... Ça ne m'est arrivé qu'une demi-douzaine de fois peut-être, de savoir que je tenais quelque chose de vraiment bien, qui ne pouvait venir que de moi et qui possèdait un vrai potentiel narratif. C'est tout à fait jubilatoire !

10 - Les lecteurs qui te suivent attendent avec impatience le troisième ouvrage de la série Time Zone, où en es-tu ?

Pas très loin, j'avais les grandes lignes en attaquant le tome 2. Et j'en suis toujours au même point. Je dois rendre mon manuscrit pour le printemps, alors il est temps que je m'y mettes ! Je sais qu'il faut que je me pose (j'ai d'autres travaux sur le feu) et ça devrait bien se passer.

11 - Est-ce que tu as d'autres projets d'ouvrage jeunesse à venir ?

Oh, oui ! Des choses pour la série des P'tits Cirés, une biographie de Mozart qui sort en 2019, la suite de Time Zone, une nouvelle série pour les 9/11 qui s'appellera "RAfa, enfant, espion & gentleman", un roman pour les Young Adult (j'aime pas trop l'appellation, mais bon) qui s'appellera : "Le club des mamans mortes". J'ai aussi des pistes pour écrire des scénarios pour la télé... Sans doute que tout n'aboutira pas, c'est aussi une composante du métier, mais la plupart de ces projets devraient voir le jour dans les deux ou trois ans.

Avis aux fans de Time Zone, une séance dédicace de Tristan Pichard est organisée samedi 22 décembre toute la journée dans le chalet du marché de Noël de Concarneau en face la maison de la presse “Le livre et la plume”

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" Rien en me fait plus plaisir que d'entendre un gamin de troisième me dire que pour une fois il a lu avec plaisir, sans se forcer. "

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